CHERCHER TOUJOURS A S’EN DETOURNER

A l’instar de quelque alphabet, tenons pour B.A BA que pour apprendre quoi que ce soit, il faille répéter l’apprentissage jusqu’à l’oublier. Tant que tu n’as pas oublié tu n’as rien appris. Encore faut-il le savoir.  

 

Autour du deuil : résumé 

 

L’un des deux axes majeurs de la vie psychique, présupposant le moi établi et l’objet fondé, s’occupe du traitement de l’excitation par des défenses intrapsychiques – dont l’excès produit les névroses -, et sous l’aiguillon de l’angoisse – dont l’excès constitue le traumatisme. L’autre axe, moins connu et qui nous retiens le plus, est fondateur du moi et de l’objet ; tout occupé du jeu entre l’intérieur et l’extérieur il utilise des défenses “combinées” – dont le déferlement mène à la psychose – sous l’aiguillon du deuil, dont le débordement mène à la mélancolie et l’évitement radical à la perversion. Au-delà des évènements flagrants, le deuil est compris comme un processus ; comme tout ce qui compte dans la psyché, les racines en sont profondes et précoces.

Le deuil originaire est donc l’épreuve première – et prolongée – par laquelle passe le moi pour découvrir l’objet ; en vertu d’un paradoxe fondateur, celui-ci est perdu avant que trouvé ; de même le Je ne se trouve qu’en acceptant de se perdre. Propulsé, entre autres poussées, par celle de la croissance, et à l’encontre de l’attraction centrifuge de la séduction narcissique, le deuil originaire ouvre au moi les capacités qui lui sont originellement promises, en particulier celle de faire des deuils ; la traversée du deuil originaire est en effet une des conditions majeures de la faisabilité de tout endeuillement.

Tout état dépressif sera un raté de deuil originaire

J’AI SOIF D’UN CHANGEMENT RADICAL

En analyse comme dans la vie, la volonté de maîtrise de soi (et des autres) est le principal obstacle au changement.

 

Certains psychanalystes le répètent : “Même après une analyse, on ne peut pas changer mais seulement ‘vivre avec’ qui l’on est.” En faites-vous partie ?

Jean-Bertrand Pontalis : Si je ne croyais pas au changement, je ne ferais pas ce métier

ÇA POUSSE AU DIRE

Un texte de Marie PESENTI 

Que fait on de la demande en psychanalyse ? selon Lacan. A cette question, je répondrais « un pousse au dire », à savoir permettre la passe des dits de la demande au dire. 

En inventant le règle fondamentale dite de l’association libre comme seule méthode pour la psychanalyse, Freud faisait l’hypothèse qu’en suivant l’enchainement des dits du patient, on allait pouvoir s’approcher de ce qu’il appelait alors « le noyau pathogène inconscient du sujet. »

Avec cette invitation à perdre le fil de sa pensée pour suivre les inattendus qui en émergent, Freud avait fait le pari que la succession des associations libres de ses patients n’avait rien de libre mais qu’au contraire elle s’orientait sur l’attractivité de ce noyau pathogène à la fois source de résistances et, à la fois, dans le même mouvement, appel à dire. Résistances d’une jouissance ignorée, aimantant la parole du patient et appel à dire venu de cet insondable qui se tient au coeur, dans cet espace, dans cet écart entre les dits qui toujours se caractérisent de leur insuffisance à dire la vérité dans ces tours du dit qui se succèdent.

J’AI COMMENCÉ LA ROUTE, JE NE LE SAVAIS PAS, AU COEUR D’UN ÉTERNEL DÉSERT

 Celui qui pleure est un magicien, un sorcier.

[ … ] Autant dire que pour la psychanalyse, la loi se forge comme Loi dans le réel ; vient du réel. C’est là, me semble-t-il, qu’il y a une hypothèse vraiment nouvelle : il y a une orientation dans le réel. C’est ça notre nouvelle mythologie, plus que l’oedipe devenu un bavardage trop commode. A partir de cette trouvaille, un gros travail de Lacan aura été d’ancrer la psychanalyse dans ce qu’il a appelé l’au-delà de l’oedipe – soit l’entre-deux-morts dont on ne sort que par la production d’une oeuvre : la « suppléance » qui re-nomme l’auteur.

A MA FILLE

6 mai 1908

 

Ma chère Mathilde,

Ce que tu m’as écrit ne m’a pas complètement pris au dépourvu. J’attendais, bien sûr, que tu prennes toi-même la parole. Car j’avais confiance en toi, et je crois que tu n’as pas trompé cette confiance. Si tu es contente de toi, je peux l’être aussi.

Je ne peux que te donner quelques conseils et attirer ton attention sur quelques précautions. Tu sais peut-être qu’aimer doit s’apprendre, comme tout le reste. Il est donc difficile d’éviter, ce faisant, des erreurs ;

PSEUDO & VÉRITÉ

Je me suis toujours été un autre.

 » Il me faut à présent, tenter de m’expliquer « en profondeur ». 

J’étais las de n’être que moi-même. J’étais las de l’image de Romain Gary qu’on m’avait collée sur le dos une fois pour toutes depuis trente ans, depuis la soudaine célébrité qui était venue à un jeune aviateur avec Education européenne, lorsque Sartre écrivait dans Les Temps modernes : « Il faut attendre quelques années avant de savoir si Education européenne est ou non le meilleur roman sur la Résistance… » Trente ans ! « On m’avait fait une gueule. » Peut-être m’y prêtais-je, inconsciemment.

INCIPIT VERS LA BEAUTÉ

Vers la beauté

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 » Le musée d’Orsay, à Paris, est une ancienne gare. Le passé dépose ainsi une trace insolite sur le présent. Entre les Mante et les Monet, on peut se laisser aller à imaginer les trains arrivant au milieu des tableaux. Ce sont d’autres voyages maintenant. Certains visiteurs ont peut-être aperçu Antoine Duris ce jour-là, immobile sur le parvis. Il paraît tombé du ciel, stupéfait d’être là. La stupéfaction, c’est bien le mot qui peut caractériser son sentiment à cet instant.